Protozoèmes

 

Protozoeme 1
La chanson d’os
Remonte le long

Du souvenir

Et fait le sang neuf

Le soleil vient taper
À la coupole
D’une tête

En son de bronze
L’eau fraîche
Ruisselle entre les doigts

Du squelette

Dans ce paysage de nacre
L’œil y est épinglé
Et la langue cuite

Protozoeme 2
Casser la coquille
Du ciel
Pour que descende l’œuf
Du soleil en gorge
Et que la magie intestinale
Rende l’hommage
À la poussière

Sourd de corps
Il reste à s’emplir
Comme des cheveux grattent
Une lune

Il reste un brin à imaginer
Une image à décaler

Protozoeme 3
Le versant chauve
De la lune
Coule derrière mon oeil
Pour en calmer les mots

Je prends
L’être égaré
L’enveloppe de feuille
De miel et de terre

Il n’y aura pas d’heures
En cette journée
Juste la masse du temps
Dans un dé à coudre

Protozoeme 4
Montrer ce territoire
Où dorment les possibles
Sans l’enclave du temps

Le geste transperce
La condition qui l’exécute
Et prolonge l’instant
Dans les nuées

Au bord de l’horizon
Les choses semblent basculer
Dans un silence retrouvé

Bougent les corps
Rythmés par la mue

Protozoème 5
Au carré bleu
De lumière crue
Et le silence attablé
Autour

Il n’y a rien à dire
Un rectangle barre
Les yeux des convives

S’enlise au mur du fond
Un lierre
Comme les minutes passent
Sous cette torpeur

Reste qu’il faudra
Sortir pour faire
Boire à la main
La lune qui lève

Protozoème 6
La marque du corps
Sur le mur disparaît


Ce souvenir sombre
Du temps brûlé
N’est plus rien pour personne

Il faudra
Par des pensées floues
Des nerfs aiguisés
Convoquer le souvenir
Des gommes
Pour succomber à la foudre
Tombée de l’oeil

 

Protozoème 7
Les feux en bras de lumière
Nous fondent dans les instants
Intranquilles

Nous nous couvrons de sang
Les yeux en billes de fer
Et soumettons à nos cris
L’alentour

Tout succombe à nos larmes
A la note d’une musique
Tandis que craquent les crânes
Sous les envolées des danseurs

 

Protozoème 8

Plonger la main
En la bouche rouge

Pour sortir le grain
Qui fera étincelle

 

Vacillement du corps
Par le chant dansé
Quelques voix soufrées

Comme fleurs au flanc

Sous les astres

De lampes de fortunes
On s’accroche les épaules
Et on boit la sueur

La magie n’est pas
De ce monde

Mais un agencement improbable
Des corps est possible

La ligne sinueuse
Des dos courbés

Colonnes bosselées
Montre le chemin électrique

Les paroles ne sont plus
Les signes submergent
La réflexion

Les nerfs remontent le temps

À tournoyer sans cesse
Si rapidement
Qu’un œil distrait
Pourrait y voir
Un moment suspendu

Protozoème 9

Par les os
Par les veines
Par cette boîte vide
Transite la parole longue

Qui fait echarpe au monde

Ce chant inutile

De particules agencées
Parcours jusqu’à la
Lumière finale

Le jeu des possibles

De la machine folle

S’échappe un mot
Il vole un temps et s’étire
Brille puis disparaît
Demeure l’onde noire
Le bruit de fond
Protozoème 10
Tu roules ta langue
En un bruit
Et commandes la fraîcheur

À tes tempes

Tu es nommé

Par ce corps étranger
En soulèvements

Bruits nuits nuées

Le masque d’un corps

Sur un tas de feuilles
Moelle spongieuse

Sur un lit de mousse

Par les yeux respirer l’ombre

Et s’épancher sur le fil
Que l’on nomme ligne
De séparation